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Crise sociale : quelles raisons d’espérer ?

Une rencontre de communauté locale autour de la lettre des évêques

Question 1. Quelles sont selon vous, en essayant de les hiérarchiser, les causes principales du malaise actuel et des formes violentes qu’il a prises ?

  1. Nous vivons dans une civilisation qui est en déclin mais qui est en même temps traversée par des forces très puissantes à l’échelle mondiale : déploiement du capitalisme financier sur toute la planète, perte de pouvoir et d’autonomie des états face aux puissances économiques, accaparement démesuré des richesses par un petit nombre.

S’ajoute à cela la prise de conscience de l’entrée de l’humanité dans une nouvelle ère : la civilisation techno-industrielle fondée sur l’exploitation de ressources naturelles non renouvelables a engendré une croissance et une prospérité inédites dans l’histoire de l’humanité, mais a eu pour conséquence le renversement du rapport entre l’homme et la nature. Nous entrons dans l’ère de l’anthropocène où l’action humaine a désormais un impact sur les écosystèmes, impact qui est dans certains cas irréversible (ex. changement climatique accéléré).

Le « mouvement des gilets jaunes » semble plutôt une réaction au premier point.

  1. Les mouvements sociaux actuels sont le symptôme du malaise, de la souffrance et de la révolte d’une partie de la population. Il ne s’agit pas des plus pauvres mais de ceux dont on a dit qu’ils étaient « juste en dessous ».

 

Les composantes du malaise :

  • un sentiment d’injustice devant la répartition des richesses. La frustration des moins riches dans un monde qui pousse à consommer toujours plus;
  • un sentiment d’inégalité devant l’écart grandissant des richesses (écart des salaires beaucoup plus important aujourd’hui qu’autrefois);
  • culture de l’individualisme ; l’homme n’est qu’un consommateur de biens. Absence du vivre ensemble, non respect des personnes, manque de dialogue;
  • un sentiment d’abandon : disparition programmée de l’État-providence, dégradation des services publics, isolement de l’individu (ou de la cellule familiale),
  • sentiment d’impuissance : manque de pouvoir des états face aux puissances de l’économie et de la finance, disparition des corps intermédiaires,
  • le matérialisme ambiant fait que les gens ne savent plus quel sens donner à leur vie. On vit dans l’immédiateté. Perte du sens, le succès de la littérature du bien-être centrée sur l’individu (prolifération des ouvrages de développement personnel) témoigne à la fois d’un malaise et d’une recherche de solutions faciles à l’échelle de l’individu.

Question 2 : Quel « bien commun » recherché ensemble pourrait fédérer nos concitoyens et les tourner vers l’avenir ?

Préliminaire : Si l’on se réfère à l’enseignement social de l’Eglise, c’est « l’ensemble des conditions sociales qui permettent, tant aux groupes qu’à chacun de leurs membres, d’atteindre leur perfection d’une façon plus totale et plus aisée ». Le « bien commun » est indivisible, un synonyme serait « l’intérêt général ». Ce n’est donc pas la somme des intérêts particuliers et on ne peut l’atteindre qu’ensemble. D’une société à l’autre et d’une époque à l’autre il peut se décliner de manière différente.

Aujourd’hui :

  • préserver à tout prix la démocratie, le respect des institutions et le devoir du citoyen ; éduquer aux valeurs citoyennes, cultiver les formes de vie qui permettent à chacun de s’épanouir, non pas individuellement mais les uns par les autres, veiller à ce que chacun ait des conditions de vie dignes;
  • respecter notre terre, la considérer comme un « commun » et non comme une source de biens exploitables à l’infini;
  • ne pas perdre de vue les fondamentaux de notre foi, par ex. les tentations du Christ : Jésus refuse l’accaparement des richesses, le pouvoir, la domination de l’autre;
  • donc, travailler pour une société dans laquelle il y aurait une meilleure répartition des richesses, moins de pouvoir des multinationales, dans laquelle les principes de solidarité et de subsidiarité seraient mis en application (développement de relations commerciales de proximité, des services de proximité, maintien d’un système social fondé sur la solidarité… ;
  • veiller au bien être et à l’épanouissement de la famille ; prendre soin des jeunes ; prendre au sérieux le système éducatif dans sa diversité (l’école est un élément du bien commun) en visant une réelle formation de l’individu et du citoyen;
  • penser au-delà des frontières, se penser européens, se méfier des communautarismes, travailler à l’intégration de tous.

Question 3 : Quelles raisons d’espérer souhaitez-vous transmettre à vos enfants et vos petits enfants ?

  • Les crises sont des accouchements ; pas de vie sans crise ; avoir confiance en la vie, qui crée sans cesse, en l’irruption du nouveau;
  • Mettre en valeur les belles expériences de vie ; favoriser le développement de la vie associative, vivre en serviteur;
  • ne pas vivre en consommateurs passifs ; se servir de sa raison ; transmettre une culture qui développe l’esprit critique ; ne pas avoir peur de s’emparer de sujets « difficiles » : l’économie, l’écologie, pour y comprendre quelque chose et ne pas se laisser embarquer par le flot des discours médiatiques ; informer son jugement ; écouter, être curieux, chercher à comprendre. Se fier aux prophètes de ce temps, aux guides spirituels;
  • avoir confiance dans la capacité d’adaptation et l’inventivité des jeunes (ils inventent des nouveaux modes de vie fondés sur plus de partage des biens qui modifient le rapport à la propriété privée);
  • la France étant « la fille aînée de l’Eglise », prier Marie…

Communauté régionale Maine CL Bobadilla

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