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Attentats de Paris : pour aller plus loin

Après la violence qui a frappé le cœur de Paris, il est bon de prendre du recul et de lire des paroles de sagesse et de réflexion…. En voici deux… N’hésitez pas à partager si vous avez d’autres textes qui pourraient nourrir notre réflexion !

Ensemble texte de Jean-Pierre Denis, directeur du journal La Vie

Compassion. Souffrir avec ceux que nous ne connaissons pas, le cœur serré nous sentir si proches d’eux. Voir une génération visée, pour briser net son insouciance. Depuis cette nuit, être hanté par ces visages de jeunes qui défilent sur les réseaux sociaux. Cette fille que l’on cherche. Ce garçon dont on est sans nouvelle, et dont on pressent qu’il ne rentrera pas à la maison. Penser à ce gentil couple biculturel du Petit Cambodge, qui aimait offrir à ses clients accueil et joie simples. Et pour nous, qui sommes chrétiens, faire monter un Requiem, déposer ces souffrances au pied d’un calvaire d’aujourd’hui.

Admiration. Sentir une ville solidaire, dans ses rues, ses taxis, ses hôpitaux. Entendre une fois de plus l’histoire de ces héros anonymes de la petite et de la grande générosité, celle qui surgit comme ça, quand il faut, dans tous les drames. Se sentir enveloppés, inclus, sans avoir rien fait dans ce grand mouvement de fraternité. Entendre alors un peu partout les voix de ceux qui se souviennent de ce que la France représente. « Liberté, égalité, fraternité », dit Obama. Un drapeau français illumine le Christ de Rio et des monuments du monde entier. La voix de notre pays s’est peut-être affaiblie, le symbole de la France n’a rien perdu de sa force.

Détermination. Nous avons tardé, tergiversé. Il s’agit désormais de détruire une tumeur idéologique monstrueuse, certes localisée à Raqqa et Mossoul, mais dont les ramifications sont d’autant plus difficiles à extirper qu’elles s’étendent dans notre propre chair. On ne fera pas l’économie de cette bataille, et plus nous serons pusillanimes, plus le prix à payer sera élevé, comme l’histoire nous l’enseigne sans aucune équivoque. Il faudra voir la mort en face. Des moyens militaires considérables devront être déployés. Une collaboration désagréable mais nécessaire devra s’installer enfin avec la Russie. Le combat contre Assad devra être mis de côté. Il va falloir accepter bien des choses qui nous déplaisent. Ce sera long. Des années, bien des années.

Distinction. Distinguer l’islamisme et les musulmans, l’islamisme et les religions, l’étranger et le terroriste, la religion et la violence. Se tenir à distance des confusions comme des dénégations. Un mal ronge l’islam sur fond de décomposition culturelle, sociale et politique. Ce gigantesque problème n’est pas « dans les religions » en général mais dans le délire islamiste en particulier. Mais constater que l’islamisme est la maladie mortelle de l’islam et le péril majeur de notre époque, ce n’est pas accuser les musulmans, nos frères humains. De Mossoul à Paris, nous sommes tous des victimes potentielles, des cibles. Nous devons agir sans laisser la fracture s’installer. Ensemble, toujours. Musulmans, distinguez-vous des barbares de toutes vos forces, résistez à leur emprise dans les têtes de trop de jeunes, dénoncez les réseaux qui s’installent dans les mosquées, soutenez les réformateurs de votre héritage ! Chrétiens, ne tombez pas dans le panneau de la guerre de civilisation, de la guerre de religion, de la guerre des nations. Vous aussi, distinguez-vous des barbares en refusant ce « votre Dieu contre le nôtre ». Et vous qui n’avez pas de religion ou peut-être en avez une autre, distinguez-vous aussi. Ne brandissez pas demain la laïcité comme une menace, un carcan, une arme rhétorique pour étouffer les libertés et humilier les hommes sincères. Ne faites pas non plus du migrant un ennemi, une colonne intérieure, un bouc émissaire.

Résolution. Ne pas nous laisser avilir ou intimider. Ni peur ni abdication. Après Charlie, je disais ici pourquoi il ne faut rien changer. La France restera un pays libre, où les filles s’habillent comme elles veulent, où l’on honore Dieu si l’on veut et comme l’on veut, où l’on fraternise, où l’on ne voit pas son prochain comme une menace. Je persiste et je signe. Ne rajoutons pas de mesures inutilement attentatoires aux libertés, mais destinées à rassurer politiquement. De la sortie scolaire à la COP 21, ne suspendons pas pour de simples raisons d’affichage les activités, les projets, les entreprises collectives. Je répète et je souligne. C’est ce que veut Daesh ! Nous ne sommes fragiles que dans la mesure où nous laissons la haine s’installer dans nos esprits et dans nos lois. Nous ne devons pas céder. Jamais. Ni après Charlie, ni après le Bataclan, ni après les drames qui peut-être viendront encore. Personne ne nous forcera à nous renier et à tomber aussi bas que ce fascisme postnational, insaisissable et mutant qui insulte Dieu. Résistons.

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“Vous n’aurez pas ma haine” lettre à Daesh d’Antoine Leiris qui a perdu sa compagne

« Vendredi soir vous avez volé la vie d’un être d’exception, l’amour de ma vie, la mère de mon fils mais vous n’aurez pas ma haine. Je ne sais pas qui vous êtes et je ne veux pas le savoir, vous êtes des âmes mortes. Si ce Dieu pour lequel vous tuez aveuglément nous a fait à son image, chaque balle dans le corps de ma femme aura été une blessure dans son coeur.

Alors non je ne vous ferai pas ce cadeau de vous haïr. Vous l’avez bien cherché pourtant mais répondre à la haine par la colère ce serait céder à la même ignorance qui a fait de vous ce que vous êtes. Vous voulez que j’ai peur, que je regarde mes concitoyens avec un oeil méfiant, que je sacrifie ma liberté pour la sécurité. Perdu. Même joueur joue encore.

Je l’ai vue ce matin. Enfin, après des nuits et des jours d’attente. Elle était aussi belle que lorsqu’elle est partie ce vendredi soir, aussi belle que lorsque j’en suis tombé éperdument amoureux il y a plus de 12 ans. Bien sûr je suis dévasté par le chagrin, je vous concède cette petite victoire, mais elle sera de courte durée. Je sais qu’elle nous accompagnera chaque jour et que nous nous retrouverons dans ce paradis des âmes libres auquel vous n’aurez jamais accès.

Nous sommes deux, mon fils et moi, mais nous sommes plus fort que toutes les armées du monde. Je n’ai d’ailleurs pas plus de temps à vous consacrer, je dois rejoindre Melvil qui se réveille de sa sieste. Il a 17 mois à peine, il va manger son goûter comme tous les jours, puis nous allons jouer comme tous les jours et toute sa vie ce petit garçon vous fera l’affront d’être heureux et libre. Car non, vous n’aurez pas sa haine non plus. »

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